Un retour (tardif pour cause de problèmes techniques) sur une très belle exposition qui se tient jusqu’au 15 septembre au Clos Lucé. Réalisée sous la direction de Pascal Brioist, spécialiste de Léonard de Vinci, Carlo Vecce, spécialiste de la Renaissance et Nathalie Crinière pour la scénographie, « Léonard de Vinci et les parfums de la Renaissance » est tout à la fois une présentation des multiples aspects du parfum à la Renaissance, un exposé sur l’intérêt que lui porte le célèbre Toscan et un parcours sensoriel qui permet de découvrir des parfums reconstitués et diffusés tout au long du parcours du visiteur.
L’affiche de l’exposition
Un parcours olfactif attend les visiteurs entre ingrédients et reconstitutions de parfums
Cette exposition s’appuie sur la vie de Léonard de Vinci (1452-1519) et son parcours professionnel, pour éclairer les raisons de son intérêt pour le parfum et permettre de saisir l’importance des compositions parfumées dans la société de la Renaissance. Montrant comment Venise en tant que porte de l’Orient apporte de nouvelles flagrances et joue un role actif dans la diffusion de réalisations d’eaux parfumées comme l’eau de Damas, l’exposition présente plus en détail le travail des « muschieri » (parfumeurs).
Emplacement des parfumeurs (muschieri) à Venise vers 1500
L’importance de Venise dans la diffusion de l’utilisation de ces parfums est illustrée par exemple par la description d’une composition de clous de girofle, noix de muscade, musc et eau de rose destinée à imprégner les robes des belles vénitiennes. A noter que l’exposition est riche de reconstitutions de costumes, réalisés notamment par Soline et Nicolas Baptiste.
Reconstitution d’une robe de vénitienne au début du XVIème
Les reconstitutions de parfums italiens présentés dans l’exposition, lorsqu’il ne s’agit pas de recette de Léonard de Vinci, tirent parti d’ouvages d’époque et en particulier un document de référence italien, le notandissimi secreti de l’arte profumatoria (1555) par Giovanventura Rosetti dont un exemplaire est présenté.
Manuel du parfumeur, texte à gauche (BNF) et exemplaire en exposition à droite
Florence, pour l’enfance de Léonard, puis Milan avec la cours des Sforza sont également abordés. Dans cette dernière, l’importance des objets et vêtements parfumés est largement documentée. Des gants de cuir, très en vogue à cette époque, sont présentés avec une évocation de parfums utilisés alors pour masquer les odeurs de tannage et faisant la part belle aux produits d’origine animale (musc, civette et/ou ambre gris). Les visiteurs peuvent découvrir dans l’exposition une recette typique plus orientée sur les épices et senteurs végétales.
Gant parfumé
L’exposition présente également la fabricaion desdits parfums. Les matières premières sont présentées ainsi que plusieurs procédés telles que la distillation ou la macération.
Explications sur les procédés de fabrication (distillation, macération…)
Une courte vidéo présente également la fabrication d’une composition à bruler sur la base d’une recette de Léonard de Vinci : l’oiselet de Chypre. Composé de gomme adragante, eau de rose, benjoin, styrax, charbon, myrrhe et bois d’aloes, l’ensemble est mis en forme et placé dans un brule parfum en forme de cage.
Reconstitution d’un oiseau à bruler dans son brule parfum d’après Vinci.
Du matériel de fabrication, dont la reconstitution d’un alambic suivant un modèle de Vinci sont présentés.
Fabrication du parfum (de haut en bas, gauche à droite) : matières premières, mortiers pilons, albarelles, distillation.
Le lien du domaine du parfumeur avec celui de l’apothicaire, outre à travers le matériel commun exposé (pots albarelles, mortiers et pilons, cornues…) est aussi exploré à travers la littérature. Notamment, l’Hortus sanitatis, livre médiéval qui présente des plantes, animaux et minéraux sous le prisme des simples médecines (voir notre article précédent dans le blog) ou encore le commentaire de Matthioli (1501-1578) sur Dioscoride, soulignent les adhérences entre l’art de la parfumerie et celui de la médecine pour qui la bonne odeur est le gage d’un environnement sain. L’exposition développe à ce sujet la question des positions relatives de l’apothicaire et du parfumeur à la cour de France.
Un exemplaire des commentaires de Matthioli exposé
Enfin l’exposition présente divers objets utilisés pour porter ou diffuser le parfum, dont une fiole découverte lors de travaux au chateau de Cheylard dont nous avons parlé lors de notre précédent blog.
Quelques objets utilisés pour porter ou diffuser le parfum
Pour terminer signalons le catalogue d’exposition édité par Le Chateau du Clos Lucé et Skira.